Le Blog et le Politique

Je suis passé quelques instants sur le blog de Jospin, où la poignée de gens qui se souviennent encore de lui postent apparemment sous de nombreux pseudonymes différents afin de garder l'ancien Premier Ministre dans l'ignorance que personne ne veut son opinion; et je suis tombé un discours d'un certain Daniel Marcovitch, qui disait en gros que Jospin est formidable, et contenant la phrase suivante:

"Etre socialiste c’est regarder l’Autre comme un autre soi-même en reconnaissant toutes ses différences comme il reconnaît les notre sans vouloir s’imposer à lui."

C'est une citation exacte (avec fautes de grammaire originelles), qui est si délicieuse qu'il faut la lire plusieurs fois pour essayer de comprendre ce que Marco voulait dire quand il l'a magistralement tapée de ses deux index. Je te laisse savourer.

Continuant ma folle tournée, me voilà sur le site de Ségolène Royal, où j'aperçois le touchant message de Mi2705:

"Notre biche s'était échappée
Et avait gagné la foret de Poitiers,
Fuyant les deux éléphants
Et leurs méchants barrissements.
Mais de loin, ils l'observaient, guettant tous ses mouvements
Habile, leurs attaques, toujours , elle esquivait
Grace a son beau sourire qui les désarmait.
seriene mais inquiete, vite son coeur battait :
Leurs derniers coups l'avaient blessée.
Qu'allait-il arriver? comment, des éléphants, se débarrasser?
soudain, on entend des coups de feu claquer
Des chasseurs crient:"Elle a gagné!"
Dans la foret, de tous cotés, ses amis accourent pour danser.
Emue, de joie, ses beaux yeux brillent
Tandis que s'en retournent
D'un pas lourd, de dépit, leur trompe balançant,
Les éléphants."

Belle conception de la politique où les électeurs socialistes sont des braconniers, et où l'arme principale d'une candidate à une élection présidentielle est un sourire désarmant. Mention spéciale pour la rime brillent/retournent. En tous cas, voilà ce qui manque à la démocratie française: l'exaltation allégorique des politiques.
Et puis Jacques Brel nous a bien prévenu de nous méfier des biches.

Ou encore:

"Elle est plus belle que la Rose,
mais avec elle, il n’y aura pas de pause.
Elle va tirer le pays ver le haut,
peu importent les coups dans le dos.
Elle est plus fraiche que la Rosée,
c’est pour elle que la France va voter.
Pour elle, c‘est Nous avant tout,
pour nous, c‘est sans aucun doute, Elle !"

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les auteurs ne sont pas en primaire.

Poursuivant mon tour d'horizon, je suis tombé sur le blog de Julien Dray, qui, pour faire encore plus jeune cool, a un skyblog, généralement réservé aux adolescents rebelles dont le sens de l'orthographe, principalement phonétique, est responsable de 87% de l'utilisation de la lettre k en France. Là, que trouves-je? des traces de populisme-jeunisme désabusé.

"Si vous avez un peu de temps à me consacrer, ça m'arrangerait. Ça m'éviterait d'être à côté de la plaque, et vous ça vous évitera peut être de dire que les politiques ne vous demandent jamais votre avis."

Le pauvre, il n'y croit même pas non plus. Mais dire "ça", c'est cool. C'est jeune. Seuls les vieux ringards de la politique utilisent "cela".
Le reste du blog est fidèle à la tradition skyblog; une image, deux lignes pour l'accompagner, la seconde étant invariablement "et vous, ça vous inspire quoi?". Le renouveau de la politique française se mesure apparemment au nombre de commentaires sur les blogs des personnalités politiques.

Le blog de Rebsamen serait inintéressant si ce n'était pour cette photo de lui où il paraît se pincer le téton gauche, dans une posture simiesque du plus bel effet. Félicitations au photographe, et à Rebsamen pour avoir précisément choisi ce cliché pour mieux souligner son propos.

Ce n'est pas fini. Direction le site de Montebourg. Cet été j'ai pris le métro 14 un soir, et à deux mètres de moi je l'ai aperçu, c'est un homme du peuple, il avait d'ailleurs des chaussures aussi délabrées que les miennes, et un instant nos regards se sont croisés, et je crois qu'il m'a reconnu.
Toujours est-il que conformément à l'image du personnage, son site dresse une splendide page de louanges de sa personne, où entre autres, deux Didier et deux Marie-Thérèse confirment que c'est un type formidable. Si Montebourg avait été modeste, il aurait mis sur son site des témoignages de personnes affirmant qu'il est merveilleusement modeste.

Pourquoi cet acharnement sur nos amis socialistes? principalement parce qu'ils sont très distrayants, et aussi parce que nos amis de l'UMP pratiquent moins volontiers le blog, ms à part Alain Juppé qui y raconte sa vie. Si Bush est un born-again christian, Juppé est un born-again déconneur.
"Sur le Plateau Mont-Royal, c'est du délire."
Cela ne se limite pas à son blog. Quelle n'avait été ma surprise de voir à la télévision Juppé, l'homme froid, aux rides du front parfaitement parallèles entre elles et au sol (sur les chantiers il pourrait remplacer le machin avec la bulle coincée dedans pour mesurer l'horizontalité), roulant en vélo sur le pont de pierre en direction de la caméra, et faisant mine, avec force cris, de foncer sur le caméraman avant de freiner in extremis! Quelle aventure. Quel homme. Quel humour, tout droit importé du Québec.

Un de ses articles a été malheureusement coupé pour n'afficher qu'un aperçu:
"Nous voici réinstallés à Bordeaux, chez nous, en famille. Joie des retrouvailles. Au fil des dernières semaines, j’ai rencontré beaucoup de Bordelaises..."
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'article n'est pas terminé. Aller sur la page complète est décevant, Juppé ne confiant pas ses indiscrétions avec la gent féminine bordelaise, mais expliquant que le peuple le réclamait pour maire, malgré sa réticence.

Ceci conclut ce voyage à travers les blogs politiques français. Il est bancal, je sais. J'essaierai dans le futur de trouver des poèmes comparant Sarkozy à un animal de la forêt pour rééquilibrer les choses.

  1. gravatar

    # by François - 3 janvier 2007 à 14:32:00 UTC+1

    Vous avez l'air de tant aimer l'orthographe et la grammaire que je me permets de préciser que votre expression "que trouves-je?" est non seulement mal orthographiée, mais aussi impossible à prononcer. En français, lorsque l'on inverse le pronom "je" avec un verbe terminant par "e", on tranforme ce dernier en "é" afin de rendre le tout utilisable verbalement. Ainsi, vous auriez dû écrire "que trouvé-je?" afin d'être totalement correct.