Réflexions postales.

Je pourrais être tenté de parler une fois encore des merveilleuses idées abyssales de l'UMP (comme le fameux "lipdub" des jeunes UMP, complet avec l'handicapé qui reste sur le quai et Montagné qui conduit une voiture. Attention lors du visionnage, nausées fréquentes possibles) ou encore la formidable avancée pour les libertés individuelles que serait de remanier notre internet à la sauce chinoise, comme le propose un député; c'est vrai que là-bas, avec la censure et le contrôle de l'information, on ne voit pas passer les blagues racistes des ministres. Un vrai paradis.

Non, aujourd'hui mon article sera axé sur les sciences cognitives, autant dire que Frédéric Lefebvre ne sera pas mentionné. Il existe dans ce domaine de recherche un concept assez étrange pour permettre d'étudier le phénomène de la conscience: celui nommé peut-être par dérision ou jeu du zombie. Un zombie au sens philosophique est une créature humaine qui n'est pas douée de conscience, mais d'aspect et de comportement indiscernable d'un être doué de conscience. La question (contestée d'ailleurs par l'excellent Daniel Dennett) serait alors: comment distinguer de l'extérieur un zombie d'une personne normale? Comment détecter la conscience, et alors, comment la définir?

Bien que Dennett montre que c'est un faux problème, dans des livres qui peut-être, un jour, seront traduits en français, le concept m'est revenu à l'esprit ce matin, en allant chercher un colis à la Poste. Déjà observé à plusieurs reprises, le guichetier en charge des colis présente à mes yeux un véritable défi philosophique. Il doit avoir une trentaine d'années, mais tout dans son être indique l'attente placide de la retraite: les grosses lunettes, les cheveux avec épis, le gros pull en laine de celui qui aurait préféré rester chez lui, le visage sans expression, l'oeil terne, le mouvement lent et qui demande une longue planification.

MOI, tendant mon reçu et ma carte d'identité. - C'est pour retirer un colis.

LUI, recueillant lentement les deux papiers, doucement, à deux mains, les yeux paniqués par mon geste vif. - Bon.

Silence.

LUI, scrutant toujours les papiers. - C'est un colis?

MOI. - Oui, un colis.

LUI, les yeux toujours rivés sur les papiers, après un long soupir. - Un gros colis ou un petit colis?

MOI. - Je ne sais pas, j'ai juste eu l'avis de passage du facteur.

LUI, plaçant lentement ses mains sur ses hanches, l'air consterné et d'une extrême lassitude à l'idée de la tâche exténuante qui l'attend. - Parce que les petits colis c'est ici, pour les gros je dois aller voir derrière.

MOI. - ...

LUI, reprenant les papiers dans ses deux mains. - Un colis...

Pour situer le cadre, il faut savoir que c'est un très petit bureau de poste, avec toujours beaucoup de monde. La queue sort de l'immeuble et se poursuit sur le trottoir, de l'extérieur on dirait une boulangerie en URSS en 1947.

LUI, toujours immobile. - Bon, un colis. (soupir, mains sur les hanches. Il pivote pour jeter un coup d'oeil sur les colis derrière lui). Bon. Je vais aller voir derrière.

Et, très lentement, avec des petits pas qui font penser qu'il marche en pantoufles, il disparaît derrière une cloison, bras tombants, dos voûté. Un jour, j'ai dû lui demander de regarder deux fois, car au bout de quelques secondes sans avoir trouvé le colis, il était revenu me dire qu'il devait être dans une autre poste. Finalement, il s'était avéré que ledit colis était posé par terre.

Est-il doué de conscience? Porte-t-il en lui la flamme de la vie, l'enthousiasme de l'existence, l'étincelle qui fait de lui un homme plus qu'un automate? Est-ce là l'homme victorieux, l'homme qui repousse les limites de son état pour comprendre la nature et le monde qui l'entoure? Il va au-delà du concept philosophique de zombie, car à vrai dire rien ne le distinguerait d'une machine, si ce n'est qu'une machine serait plus rapide. Rien dans son visage n'indique la compréhension, l'empathie pour le client qui vient de se taper une heure d'attente dans le froid, le désir d'être efficace pour se prouver au moins à soi-même qu'on peut l'être. Il semble incapable de passions, du curiosité, ou même d'intérêt pour quoi que ce soit. Rien ne brille dans ses yeux.

J'ai eu mon colis, mais à quel prix?

Morano et rhétorique.

J'aimerais prendre des vacances, mais on ne me laisse pas, et encore, mes listes de choses indignes que disent et font nos ministres sont loin d'être exhaustives. Pendant que Martine Aubry, toute seule dans son coin, crie déjà à la victoire totale aux régionales, même, pouffons un peu, en Alsace, alors que Ségolène Royale, en mal de lumières, la critique à chaque occasion, la droite continue son petit bonhomme de chemin à se ridiculiser en lançant des énormités.

Il y a d'abord Rachida Dati, qui adore les médias et que l'on parle d'elle, mais qui parfois, en oublie ses micros. Elle trouve très contraignant qu'à Strasbourg, un député soit obligé d'être présent, parce que dans le cas contraire cela se sait. Que ses électeurs se réjouissent qu'elle prenne tant à coeur le mandat législatif qu'ils lui ont remis entre les mains.

Ensuite, Nadine Morano, dans une soirée en hommage à Barrès, raconte que "le jeune musulman" doit mettre sa casquette et ses mots à l'endroit. Scandale dans les médias, on ne parle pas ainsi par clichés niais. Par contre, je n'ai vu personne être scandalisé qu'une ministre de la République assiste à une soirée rendant hommage à l'un des fondateurs de la pensée d'extrême-droite française, sous couvert de débat sur l'identité nationale. Mme le ministre de la Famille, quelles belles valeurs pour nos enfants. Aucun média n'a trouvé étrange que le lendemain de la déclaration d'Hortefeux de créer un préfet spécial pour lutter contre l'antisémitisme, Nadine Morano rende hommage à un homme qui était antidreyfusard jusqu'au bout ("Que Dreyfus ait trahi, je le conclus de sa race"). Même le FN n'ose pas ressortir ce type de personnages. Et pourtant, personne ne s'émeut. Il faut dire que Barrès a théorisé le Français avec un F majuscule comme l'UMP le verrait bien: génétiquement différent, à part, de tous les autres peuples, d'une essence unique, façonnée par les siècles. C'est vrai, c'est une bonne idée que remettre à la mode les théories nationalistes du début du XXie, à l'époque cela n'a fait de mal à personne.

Quant à sa harrangue du "jeune musulman", elle est révélatrice de l'état d'esprit de la ministre. Ce n'est pas tant le cliché du musulman qui parle en verlan ou qui met sa casquette à l'envers qui est important, bien qu'évidemment cela trahisse un communautarisme primaire: lui, le musulman, outre s'être trompé de Dieu, ne parle pas comme nous, ne s'habille pas comme nous. C'est un Autre. Bien sûr, le lien insolite entre casquette, verlan et religion émane de l'esprit confus de la ministre, mais le message sous-jacent est révélateur.

Mais ce qui est le plus parlant, c'est l'utilisation du singulier, "le jeune musulman". Ce procédé qui nie aux musulmans le droit à la diversité de vues, d'opinions, d'attitudes, puisqu'ils sont tellement tous les mêmes qu'on peut parler d'eux comme un seul homme, montre toute l'estime que Mme Morano a de ses concitoyens mulsumans. C'est le procédé de base de tout rejet de l'autre: au lieu de parler d'êtres en tant qu'hommes et femmes, on les groupe dans une catégorie arbitraire (juif, arabe, musulman, jeune, patron, etc) que l'on considère comme uniforme, de telle façon à ce qu'avec un exemple caricatural on puisse déduire des lois générales de l'ignominie présumée de la catégorie choisie. C'est bien sûr un raisonnement logique erronné, et cela on le sait depuis la Grèce Antique, c'est le spectre du syllogisme abusif:
  • J'ai vu M. Grobeuge voler une pomme
  • M. Grobeuge a une moustache.
  • Tous les moustachus sont des voleurs.
Après, il devient inutile de considérer les moustachus comme des personnes à part entière, mais comme un archétype, le moustachu, qui recouvre parfaitement toute la population qui compose la catégorie.

La déclaration de Nadine Morano peut donc être vue comme de la malhonnêteté intellectuelle et/ou comme de la bêtise. Je ne me prononcerai pas sur le dosage des deux quantités.

Bon, sinon, pour rigoler encore, les jeunes de l'UMP ont récemment sorti une sorte de clip musical, sans avoir l'autorisation des auteurs. Cela, évidemment, s'appelle du piratage, ils n'ont pas dû bien lire la loi Hadopi. C'est de la récidive, car déjà l'UMP a dû verser 30000€ au groupe MGMT cette année pour la même chose. Ils avaient bien proposé un euro symbolique de réparation, mais le groupe a été intransigeant. Oui, ce sont les mêmes qui ont voté une amende de 1500€ (sans compter les éventuelles poursuites pénales avec peines de prison) pour les malfrats qui téléchargeraient une chanson de Garou.

Vivement, vivement les régionales, parce qu'après, Lefebvre est pressenti pour être ministre de la communication. Je devrai probablement faire plusieurs articles par jour.

Estrosi gagne un point Godwin.

Un point Godwin, dans la parlure Internet, c'est une récompense décernée à un des participants à un débat quelconque qui, à court d'arguments et en désespoir de cause, associe la position de son interlocuteur à l'idéologie nazie.


L'heureux élu se trouve alors l'heureux possesseur d'un point.

M. Estrosi a bien mérité son point. Dans cette truculente vidéo, le ministre nous parle du débat sur l'identité nationale. D'après lui, si l'Allemagne des années 30 avait eu un débat sur l'identité nationale, la Seconde Guerre mondiale aurait été évitée. On en déduit en cascade:
  • Il est erroné de considérer que ce débat n'existe qu'à des fins électoraliste pour rameuter sous la houlette UMP les anciens FN, car au contraire c'est un débat anti-nationaliste,
  • A la vérité ceux qui sont contre ce débat auraient aidé les nazis en une autre époque,
  • Sarkozy est peut-être en train de désamorcer à l'avance la Troisième Guerre mondiale.
On apprend entre autres que l'Allemagne des années 30 avait complètement oublié la question de la nation, qui leur est passé vraiment par-dessus la tête. Si seulement les Allemands avaient plus parlé de leur peuple, de leur histoire, de leurs frères derrière d'autres frontières, des éléments indésirables au sein de leur population... C'était un coup à ringardiser direct Hitler, foi d'Estrosi. Une occasion manquée. D'ailleurs si un scientifique français, bénéficiant des immenses investissements dans la recherche de la France, inventait une machine à remonter le temps, il serait inutile de l'utiliser pour chercher à assassiner Hitler: il suffirait qu'il retourne proposer à nos amis outre-Rhin de vraiment réfléchir à leur identité nationale.

Pendant qu'Estrosi nous démontre l'étendue de ses capacités mentales, de l'autre côté, les militants locaux PS votent à écrasante majorité pour que Georges Frêche, l'ami des Harkis, soit en tête de liste aux régionales.

Sois sans crainte, lecteur, maintenant que la petite-fille de Le Pen se lance en politique, dans les régionales en Yvelines, elle pourra peut-être tempérer un peu toutes ces choses dégoûtantes.

Le marathon de l'UMP.

En voilà un beau moment que ce modeste blog n'a pas été mis à jour. Je blâme tous les autres à ma place. Pourtant, quelle fête, ces dernières semaines! Quelles explosions médiatiques! Le monde politique semble décidé à rivaliser avec Hollywood et TF1 pour divertir les masses. Par monde politique bien sûr, je ne parle pas de la gauche, qui doit sûrement être en vacances. Mais la droite nous reste, et quelle droite! Une droite bien française, que l'on pourrait incorporer dans le concept vaporeux d'identité nationale (j'y reviens) tant elle nous est propre, et que personne d'autre au monde ne voudrait, sauf peut-être les italiens.
Je ne résiste pas à faire une petite liste récapitulative des dernières semaines:

  • Hadopi2 est voté, la Culture Française est sauvée! Mais ce n'est pas fini, le Ministère de la Culture travaille sur des dispositions pour favoriser positivement le téléchargement légal. Parce qu'Hadopi, c'est de la pédagogie, paraît-il, avec des amendes de 1500€ et des peines de prison pédagogiques. C'est les 30% de faux positifs garantis qui vont en apprendre des choses. Malheureusement, le budget de l'année prochaine ne prévoit que 5,3 millions d'euros pour l'Hadopi, alors que les transformations massives des réseaux impliqués par la loi auraient demandé 100millions du contribuable. Qu'à cela ne tienne, il faut penser au téléchargement légal, à promouvoir absolument. C'est le Luxembourg qui va être content, parce que c'est là que sont établies les plateformes légales pour des raisons fiscales, malgré les adresses finissant en 'fr'. Mais l'UMP a l'esprit européen.

  • Le ministre de la Culture pris dans la tourmente médiatique! On l'accuse d'être un touriste sexuel, lui explique qu'on lui en veut pour son homosexualité, que tout ce qu'il a fait c'est aller aux prostitués quadragénaires alors qu'il faisait du tourisme en Thaïlande. C'est différent. Télécharger une chanson de son groupe préféré que l'on va aller voir en concert, c'est punissable par la loi et condamnable moralement. Profiter de la misère des pays pauvres pour en soutirer des faveurs sexuelles, une erreur sans doute, un crime non, une faute même pas.

  • Hortefeux est filmé en train de faire une blague raciste. On a le droit de faire des blagues racistes. C'est drôle, quand on a bien convenu entre nous que c'est du second degré. Quand on est ministre de l'intérieur et qu'on se félicite régulièrement du nombre exponentiel d'expulsions d'étrangers, le second degré est largement moins évident que si c'était disons Stéphane Guillon qui avait fait la blague, et ça met l'homme en perspective. Alors, la machine à communication du gouvernement s'emballe, avec l'appui précieux du crétinissime Frédéric Lefebvre, et plusieurs explications bancales se suivent: Hortefeux ne parlait pas des arabes, mais de 'clichés', puis après on a dit que ce n'était pas les clichés, mais les 'auvergnats'. On a vite trouvé le véritable coupable, le responsable ultime de la confusion: Internet. Tout le monde monte au créneau: quoi, Internet n'est pas censurable! Une information, un film tourné en public pendant une manifestation officielle de l'UMP peut se retrouver à disposition de tous, sans possibilité de couper le robinet! Quel scandale honteux! vivement Hadopi, que l'on puisse déconnecter au moins les plus gênants. Le discours est alors unanime, de Lefebvre à Copé en passant bien sûr par Hortefeux: il faut pouvoir contrôler Internet, le censurer, frapper d'un sceau d'approbation gouvernemental tout ce qui y circule. Un espace de liberté et d'échanges, non bridé par la censure, est une menace à la démocratie et à la politique. Chacun apporte sa petite pierre à un discours charmant d'anachronisme et d'autoritarisme.

  • Internet, encore lui! Alors qu'on allait tranquillement refiler une bonne planque au fiston, voilà donc que les citoyens lambda ont fait mousser l'ascension étrangement rapide de Jean Sarkozy, au point que les médias nationaux se sont sentis obligés de ressortir eux aussi l'affaire. Comme si quand on a 23 ans et un diplôme Bac+0 on ne pouvait pas gérer le plus grand quartier d'affaire d'Europe! Quel espoir, pour les jeunes des banlieues, de voir que sans faire d'études, sans qualifications, sans avoir travaillé, on peut se retrouver comme ça, à la tête d'une machine aussi énorme. L'ascenseur social, en plein essor. Jeannot, pour l'occasion, avait coupé ses cheveux et avait mis des lunettes, pour faire moins tête à claques, mais, malheureusement, il donnait plutôt l'impression d'avoir 12 ans. Tout l'UMP, tout le gouvernement, comme un seul homme, se dresse pour sauver le dauphin: on le compare aux généraux de la Révolution, très jeunes, et c'est vrai que ce n'est pas de la faute de Jean si au lieu de remporter des batailles et de retourner l'Histoire il est juste le fils de son père. Ce dernier, sans pouffer, le jour même, fait un discours aux directeurs des lycées pour leur expliquer que seule la méritocratie compte depuis la Révolution, que le temps des privilèges est révolu. Je crois que c'est Luc Chatel qui a dénoncé le mauvais procès de 'sale nom', et a fait le parallèle avec la discrimination raciale. Je ne vais pas faire la liste complète de toutes les choses tout aussi indignes et honteuses qui ont été vomies dans les médias, ce serait trop long. Enfin, le sourire de mépris total toujours au coin de la bouche, Jean, sermonné par papa, a fini par reculer face à la colère des français, se contentant, comme un misérable, de n'être *que* administrateur de l'EPAD. Evidemment, en bonne tradition de l'UMP, face à l'indignation, Jean se pose en victime: s'il ne s'appelait pas Sarkozy, il aurait été pour lui beaucoup plus facile d'être président de l'EPAD.

  • Le dimanche suivant, David Douillet est élu député. C'est vrai que lorsque l'on pense à la rédaction et la réflexion sur le droit, aux évolutions juridiques à apporter, à la complexité de la loi, la première chose que l'on se dit, c'est: il faut absolument qu'un sportif de haut niveau s'en occupe, le genre qui n'a fait pas d'études pour gagner des médailles en renversant des gens sur un tapis. Et quelqu'un de moderne avec cela: dans ses autobiographies, il explique qu'il trouve anormal et contre nature que les femmes travaillent, et qu'il est normal, par contre, d'être misogyne, sauf pour les 'tapettes', bien entendu. C'est des gens comme cela qu'il nous faut pour écrire la loi, pour donner un cadre sain à la société.

  • Après, un petit détail qui a fait somme toute peu de bruit, la révélation du coût de l'installation temporaire d'une douche grand luxe pour Sarkozy, au Grand Palais, à 100m de l'Elysée, pour une réunion de quelques heures: plus de 245 000€. De quoi faire rêver les smicards. C'est l'infatigable député Dosière, un des cinq députés à être transparent sur la gestion de ses dépenses professionnelles, qui révèle la chose. A l'UMP, on lui prête à cette occasion une 'malhonnêteté intellectuelle' ainsi qu'un 'antiparlementarisme primaire'. Non, moi non plus, je ne comprends pas.

  • Ensuite, il y a eu un petit creux, et Hortefeux s'est senti obligé de le combler en parlant d'instaurer un couvre-feu pour les mineurs. Bien sûr, un policier peut déjà ramener chez lui un mineur le soir, mais il fallait bien lancer une petite polémique gratuite et crétine pour rassembler l'électorat de droite qui commence malgré tout à s'y perdre.

  • Pour continuer dans la voie, et pour faire oublier que la France a expulsé des afghans pour les ramener dans un pays en guerre qu'ils avaient fui (et où la France a même des opérations militaires qui essuie des pertes) où les attentats, assassinats et rapts sont monnaie courante, Eric Besson a alors lancé le grand débat sur l'Identité Nationale. Qu'est-ce que l'identité nationale? Ces deux jolis mots, popularisés par Le Pen dans les années 80, ont l'avantage de ne rien vouloir dire de particulier. Ou plutôt tout: à entendre Lefebvre et les ministres, tout ce qui peut arranger la droite fait partie de l'identité nationale. S'agit-il de définir l'essence éternelle de la nation, ce qui fait qu'un français est dans l'absolu une créature distincte fondamentalement d'un allemand ou d'un anglais? Faut-il définir plutôt ce qui n'est pas français pour en déduire ce qu'est être français? S'agit-il de la culture, de l'organisation politique et sociale? Et quand bien même, qu'y a-t-il à débattre? On nous enjoint à faire un grand débat, mais il n'y a surtout ni cadre défini ni enjeux. Ca fait des belles unes de journaux, les journalistes ne parlent que de ça et oublient de rappeler des choses comme la situation économique et sociale, l'envolée des dépenses, les déficits et ce genre de choses désagréables. Il me tarde d'avoir les résultats du débat, pour savoir comment je dois changer pour accorder mon état de français à ce qu'aura défini le gouvernement. Mais ça fait plaisir à l'aile droite-droite du parti, qui a sans doute déjà eu chaud au coeur de voir de Villiers incorporé à la belle machine UMP. Il faut bien aller râcler la fange de l'extrème-droite, si ça peut aider pour les régionales.

  • C'est une tellement jolie opération, que les voix discordantes sont désagréables. Eric Raoult, député-maire UMP, trouve que les lauréats du prix Goncourt devraient avoir un 'devoir de réserve' concernant la personne du président. C'est le spectre du contrôle de l'information et des gens, déjà vu plus tôt avec Internet, mais aussi avec l'idée aberrante d'installer de plus en plus de caméras dans les villes (Hortefeux devrait aller voir en Angleterre la coûteuse inefficacité du dispositif, outre les aspects de vie privée); cette fois-ci, ce sont les écrivains qui sont visés. Le Ministre de la Culture, lui-même écrivain, va voler au secours des artistes et de leur liberté d'expression. Ah non, pardon, je l'ai confondu avec un homme de principes. Il a juste dit qu'il ne voulait pas intervenir. Beau défenseur des lettres!

  • Enfin, c'est tout neuf aussi, le débat sur l'homoparentalité fait ressortir la droite sur ses grands chevaux moralisateurs. Les parents, avant d'être des gens qui aiment leurs enfants, doivent surtout posséder des parties génitales différentes: sans cela, apparemment, la jeunesse perd tous ses repères, et va droit à l'égoût. Pour Xavier Bertrand, avoir un père et une mère, c'est un droit de l'enfant. Désolé, petit Paul, tu vas devoir rester seul à l'orphelinat, parce que le couple qui voulait t'accueillir et t'aimer a la particularité physique d'être du même sexe. Mieux vaut pas de parent, que deux qui se ressemblent trop. Mieux vaut pas d'amour, que de l'amour de gens qui ne correspondant pas au schéma propre à notre identité nationale. Tu nous remercieras plus tard.
Bon, maintenant il ne reste plus qu'à attendre que Pasqua balance tout sur l'ère Chirac/Balladur avec derrière Villepin/Sarkozy, pour avoir la suite du spectacle. Quoique, il commence à se faire vieux le Charles. Un accident est bien vite arrivé.

Des gens raisonnables.

Voilà un moment que je n'avais pas parlé d'Hadopi, dont la seconde mouture va être votée le 15 septembre. La solution à tous les maux? Non, ça ne fait pas encore assez plaisir à l'industrie (on ne demande pas l'avis des artistes de toute façon), alors ensuite, on va repartir sur un Hadopi 3: le ministère de la culture a déja lancé une commission pour une autre loi, présidée par le patron de la maison de disques de Carla Bruni. Les copains, toujours les copains.
L'industrie de la musique, donc, n'est pas contente. Les ventes de CDs sont en chute libre, ce qui paraît évident vu que tout le monde écoute de la musique sous format numérique. La cause officielle? Ces sales pirates, bien entendu. Soit dit en passant, ces pirates sont apparemment exclusivement mélomanes vu que la fréquentation des salles de cinéma, par exemple, a bondi de 56% cet été, sans Hadopi.
Alors, chez les majors, on fulmine, les marges ne sont plus aussi énormes que dans les années précédentes, malgré l'envolée des ventes de mp3 qui ne coûtent rien (pour eux) mais si cher (pour nous). Déjà, il y a quelques moins, Maxime Le Forestier avait traité les anti-Hadopi de pétainistes. (Du coup, Maxime joue à la Fête de l'Huma ce week-end, où il ne risque pas de rencontrer des gens qui sont pour le partage de la culture, ces fachos.) Alors, il fallait filer la métaphore. Christophe Lameignère, patron de Sony France et président du Syndicat National de l'Edition Phonographique, a vaillamment déclaré que « ces gens-là, ils auraient vendu du beurre aux Allemands pendant la guerre ». Et quand certains citoyens veulent savoir quels députés vont voter pour la loi, en tant que représentants de la nation , « ils proposent de faire le outing des députés qui vont voter cette loi, vous vous rendez compte ? Ils dénoncent ! Ce sont des gens qui sont dans le principe de la dénonciation. Et je pense qu'il faut le dire, il faut le dire qu'on ne peut pas avoir confiance dans des gens qui dénoncent. » C'est tellement beau, je ne savais même pas que le concept d'assimiler désir de transparence démocratique et délation par des collabos pouvait exister. Cependant, en prenant un sens plus raisonnable de "dénoncer", on ne peut dénoncer que ce qui est honteux ou scandaleux, en cela il n'a pas tout à fait tort.
En termes geek, cela s'appelle gagner un point Godwin: dans un débat, le premier qui compare son adversaire aux nazis (ou assimilables) perd. La loi de Godwin stipule qu'un débat sur internet qui s'éternise voit la probabilité de la distribution d'un point Godwin tendre vers 1. Un autre petit nom est celui de l'argument fallacieux ad Hitlerium.
En tous cas, si son discours ne donne pas envie aux Français de se ruer pour acheter des disques, pour lui faire plaisir, je ne sais pas ce qu'il faut, la cause est perdue. Le monsieur n'a pas du bien lire toutes les études qui montrent que les gens qui piratent le plus sont ceux qui dépensent le plus en produits culturels...

Respirons. Pendant que l'industrie du disque meurt interminablement, et avec si peu de grâce, d'autres gens essaient de trouver des pistes, des solutions possibles. Mardi dernier, a été fondée la SARD, Société d'Acceptation et de Répartition des Dons. Le principe est simple: c'est un organisme indépendant qui peut accepter des dons destinés à des artistes. Cela peut permettre à des particuliers de donner quelques euros par ci par là à des artistes distribuant gratuitement leurs oeuvres sous licence Creative Commons, par exemple, mais aussi à tout artiste (même signé sur un label) qui voudra bien s'inscrire. Après tout, donner à l'artiste 3€ directement lui remplit plus les poches qui si l'on achète son CD 20€.

RMS, qui sait très bien rester flou ou fermer les yeux quand je le prends en photo.

Le concept de SARD met partiellement en oeuvre le concept de Mécénat Global, qui permet à tout un chacun d'encourager les créateurs et de spécifier vers qui se dirigent ses dons. Au lieu d'une loi de répression, de présumé coupable, de surveillance généralisée des réseaux, Richard Stallman,alias RMS, qui tenait une conférence après la création de la SARD, propose des contributions volontaires, constructives, justes. En plus, avec son air sympathique de hamster jovial, et son français enthousiaste, il est difficile de ne pas se laisser entraîner par le propos.
Certains se diront, mais pour faire de la musique, il faut de l'argent, une grosse industrie qui prend en charge les coûts énormes de production, fabrication, promotion, etc. C'est ce qu'on disait des logiciels il y a quelques années, et pourtant Stallman a réussi à lancer le mouvement des logiciels libres. Contre une logique de licences propriétaires coûteuses de logiciels que l'on nous cède temporairement le droit d'utiliser, sans savoir comment le produit marche, ce qu'il fait réellement et n'ayant pas le droit de le partager (Microsoft & Apple), le logiciel libre replace l'utilisateur et le développeur au centre, appelant à la contribution de chacun, dans une clarté totale de principe, dans une liberté totale de partager, modifier, copier, et d'utiliser comme bon nous semble. Le succès le plus flagrant est le noyau Linux, qui fait tourner la machine qui héberge ce blog, qui fait tourner mon ordinateur, qui fait tourner ma Freebox qui me connecte à Internet, et qui fait même fonctionner mon téléphone.
Il est donc possible de construire quelque chose de solide en ne se basant que sur la bonne volonté des gens. Bien sûr, ensuite, les entreprises se rendent compte qu'elles y trouvent leur compte. Des gens comme Radiohead ou Nine Inch Nails ont montré que non seulement c'était faisable pour la musique, mais que ça peut également être très rentable. Au lieu d'assister à tout prix une industrie du disque mourante à juste titre, le gouvernement serait plus avisé de trouver des pistes permettant de généraliser ce type de processus qui, contrairement à la loi Hadopi, bénéficie réellement aux artistes.

Un peu de littérature que diable VI.

C'est reparti.

29. The Prestige, Christopher Priest
Comme la couverture le rappelle subtilement, c'est le livre qui est à l'origine du flim du même nom, que j'avais aimé pour plusieurs raisons. Il s'agit de la rivalité viscérale entre deux magiciens qui s'ingénient à détruire mutuellement leurs numéros, jusqu'à ce que l'un d'eux mette au point un numéro que personne n'explique. La rivalité prend alors des dimensions steampunkesques avec l'intervention de Tesla, et l'obsession de destruction mutuelle prend alors des proportions maladives. La fin est chouette aussi. Le livre est cependant en dessous du flim parce que Christian Bale ne peut pas jouer dans le livre.


30. Spin, Robert Charles Wilson
Revoilà de la bonne SF, mal desservie par son résumé: un jour, soudainement, la Terre est englobée dans une sorte de membrane opaque qui l'isole totalement du reste de l'univers. Si la couverture n'avait pas mentionné le gain d'un Hugo Award, comme le chef d'oeuvre Tous à Zanzibar de John Brunner, j'aurais passé mon chemin car l'idée de départ fait un peu ringard. Pourtant, la force du roman est dans les relations compliquées entre le narrateur et deux jumeaux qui sont comme le reste du monde obnubilés par ce qui arrive à la planète, et qui réagissent à l'opposé. Vers la fin du livre, le côté SF ressort par-dessus l'aspect psychologique qui domine l'histoire, avec entre autres la biologie évolutive d'entités froides vivant sur d'immenses distances dans l'espace.


31. La Confession d'un enfant du siècle, Alfred de Musset
Je crois que j'ai toujours cru avoir déjà lu Musset, alors que manifestement non. Ce roman témoigne, comme les oeuvres romanesques de Benjamin Constant (voir plus bas), que certaines époques se prêtent plus à des sentiments violents et compliqués, ou plus à les glorifier ou du moins à les exposer viscéralement. L'histoire, la passion (avec un P majuscule et un accent circonflexe sur le a) se bousculent en se mélangeant avec une certaine indifférence paradoxale. On ressort de ce déchaînement un peu vidé, comme si on venait de perdre quelque chose.

32. As I lay dying, William Faulkner
Si j'avais compté sur Faulkner pour me remonter le moral, je me fourrais le doigt dans l'oeil. C'est un plongeon noir dans le calvaire cru d'une famille de paysans américains qui transportent le corps de la mère décédée dans une ville qui leur semble lointaine. Les rouages violents et rouillés des relations entre les personnages ressortent dans les non-dits, dans les postures, et cassent parfois. Les dernières pages donnent envie de donner des coups de poings à Faulkner et à son personnage du père.


33. Adolphe, Benjamin Constant
Benjamin Constant est un personnage que l'on retrouve un peu partout à son époque. Il arpente les salons, se mêle de politique. Et puis, aussi, il écrit, mais toujours de manière autobiographique. Il est très facile de l'imaginer, droit, dans les salons à la mode, déclamant ces lignes d'un air faussement modeste et ingénu à un parterre de femmes captivées. Rongé par l'ennui d'une vie bourgeoise et oisive, Constant se lance à l'aventure, parcourant l'Europe poussé uniquement par sa soif de conquêtes. Son existence n'est qu'une succession de passions violentes et obsessionnelles qui retombent instantanément une fois sa cible vaincue. C'est un éternel insatisfait, capable des emportements les plus passionnés et de la froideur la plus cruelle une fois ses objectifs atteints. Il n'y a pas forcément méchanceté, ni planification, on sent juste quelqu'un qui a le luxe de faire selon son bon vouloir, et qui le fait sans considération pour autrui. Ce narcissisme qui pointe à travers le livre est décrit avec une sincérité qui semble totale, presque dérangeante. On aimerait le détester, mais ce n'est pas si facile.

Nos maitres Google.

Je suis un assez vieux con pour avoir connu Internet avant que Google n'existe. A l'époque, j'avais une connexion du feu de Dieu qui prenait le téléphone pour uploader mais le cable pour downloader, les CDs d'AOL submergeaient la planète, et la production de Duke Nukem Forever allait bientôt commencer. J'écoutais Blur et Oasis, et j'étais assez naïf pour croire que c'était Oasis qui allait gagner. Exilé, je commençais, timidement, à utiliser Napster pour pouvoir écouter de la chanson française. J'encodais mes disques en mp3 à 128kbps, en ayant des sueurs froides à l'idée de la place qu'ils prenaient sur mon disque dur de 700Mo.

Les poids lourds d'Internet s'appelaient AOL et Microsoft. La télévision regorgeaient de publicité pour Lycos ou Yahoo. Les blogs n'existaient pas, mais les pages personnelles Geocities, avec leurs couleurs vives et leurs gifs animés ringards, débordaient de tout leur mauvais goût sur les nouvelles voies de l'information. Les sites étaient conçus par des pionniers qui n'avaient aucun sens de l'esthétique et qui codaient comme des chaussettes. Internet, à cette époque, était gras, surchargé, aggressif, brouillon.

Et puis une des innombrables nouvelles entreprises est venue dans ce fouillis, avec comme interface principale une page blanche, avec un unique champ de recherche au milieu. Net, dépouillé. Au-dessus, un nom tout rond qui ressemble à un mot d'enfant. Google était sobre et faisait des recherches pertinentes. Les gens ont commencé à l'utiliser.

Maintenant, ce sont nos maîtres. "Google" est devenu un verbe en américain. Petit à petit, service par service, ils ont rongé les marchés des concurrents, avec toujours la même efficacité, et la même sobriété. Ils détiennent probablement plus d'informations personnelles que la plupart des gouvernements. A intégrer tous leurs services, ils peuvent reconstituer des vies entières. Ils hébergent au même endroit courriels, flux rss, documents, blogs, historiques de recherche, etc, jusqu'à la position des personnes par GPS. Ils peuvent savoir ce que disent les gens, ce qui les intéresse, ce qu'ils cherchent, ce qu'ils veulent, ce qu'ils pensent, où ils sont.

Pourtant, contrairement à Microsoft, qui s'est répandu par la force, et Apple, qui a trouvé sa niche par une alliance originale d'innovation, de marketing et de fermeture totale de ses produits, Google a par comparaison toujours joué l'ouverture et la clarté, avec toujours plus de services gratuits et réutilisables à loisir. Alors, naturellement, ils se répandent toujours plus dans tous les recoins d'Internet, en inventant de nouveaux quand le besoin se fait sentir. On fait confiance à Google, nos bienveillants dictateurs, là où pour toute autre entreprise ou gouvernement, on aurait crié au scandale.

Aussi, pour compléter mon statut d'homme googlifié, j'ai troqué mon téléphone pour un splendide HTC Magic incorporant la plateforme Android. Android, c'est du Linux, avec tout plein de Google scotché dessus. Le résultat est un petit ordinateur portable, tacticle, qui tient dans la main, constamment connecté à Internet, et qui accessoirement permet d'émettre et de recevoir des appels. C'est une fenêtre qui donne spécialement le regard sur tout l'univers Google, mais aussi sur le reste. Google Mail/Talk/Reader/Maps/Agenda/Docs/Blogger/Picasa toujours sous le pouce. L'appareil photo se tranforme en lecteur de code barre pour chercher si un produit n'est pas moins cher sur internet. Le GPS lié à Google Maps et Street View fait que se perdre quelque part relève de la mauvaise volonté. Le téléphone, vu directement comme une clé USB sous Linux. Des bureaux virtuels sur le téléphone. La connectivité Wi-Fi à toutes les box SFR et Free (et appels vers les fixes en France illimités en profitant du serveur SIP de Free, d'ailleurs). Un client SSH pour me connecter à mon serveur, un client pour vérifier ce que fait mon serveur rtorrent, ou pour donner un fichier nzb à manger à Sabnzb+. Une application pour changer automatiquement la sonnerie, par exemple, suivant la zone géographique où l'on se trouve. La télé sur le téléphone pour regarder le Tour de France même aux toilettes. Un répertoire d'applications qui ne cesse d'agrandir, et même, joie suprême, la possibilité d'écrire ses propres scripts Python pour contrôler le téléphone.

Moi, homo googlius, suis maintenant en permanence connecté, libre de faire ce que je veux et pourtant remettant mes données aux mains de tiers. Allez, encore quelques décennies et on arrivera enfin aux implants neuronaux à la Peter F. Hamilton, avec du Google Ads dedans.

Hadopi, suite et espérons fin.

Ca y est, le conseil constitutionnel a rejeté le principe de sanction administrative conduisant à la coupure d'internet, au nom de la liberté d'information et du respect de la présomption d'innocence. Qui eut cru que la volonté de Sarkozy de faire plaisir à ses amis pouvait se heurter à quelque chose d'aussi banal que la constitution?

Hadopi n'aura donc pour seul pouvoir et utilité que d'envoyer des mails.

Albanel, qui a oublié qu'elle avait promis sa démission si la loi ne passait pas, s'acharne à vouloir faire passer sa créature, même si elle est déjà morte. Quitte, ensuite, à l'amender pour que la coupure d'accès à internet soit prononcée par un juge.

Sachant qu'elle a promis 1000 déconnexions par jour, les juges, qui s'ennuient, vont applaudir l'idée. Surtout que dès le premier procès tout avocat digne de ce nom n'aura qu'à soulever que l'adresse IP est falsifiable, et après tout le monde pourra rentrer chez soi.

En attendant un gouvernement qui saura enfin pondre une loi qui fait entrer l'accès à la culture dans le XXIe siècle, au lieu d'essayer péniblement de faire durer les habitudes révolues du XXe, chacun peut déjà ajouter un filtre envoyer directement tout mail reçu de *@hadopi.fr à la poubelle.

Europe.

Quel week-end mouvementé dans le monde! Alors que les brésiliens ont arrêté de ramasser des cagettes dans l'océan pour retrouver le vrai Airbus A330 en lambeaux, alors que la France salue la mort d'Omar Bongo tout en cherchant, selon toute probabilité, avec frénésie si des fois l'homme n'aurait eu la mauvaise idée de laisser des mémoires ou des papiers embêtants derrière lui, alors que le feuilleton Obama est passé sur nos plages, dans nos musées et s'est envolé à nouveau vers Washington avec des robes dans les soutes, quelques-uns ont quand même pensé à aller voter.

La première chose, c'est que l'UMP a gagné. Certes, pas aussi chichement que les droites des pays alentours, qui taquinaient plus volontiers le 40% que le 28%, mais c'est un succès tout de même. Je ne me hasarderai pas à une analyse, car honnêtement je ne sais pas trop. Le processus est toujours le même: on gère l'hôpital/l'université/la justice/l'audiovisuel/la culture comme une entreprise comme les autres, en nommant un copain de Sarko à sa tête, et on fait tout un tas d'annonces éphémères qui font bien au JT de 20h et que tout le monde oublie vite (le télétravail quand on est malade, les fouilles systématiques à l'entrée des lycées, pour les derniers spasmes absurdes), ou alors on fait des lois creuses et innaplicables pour pouvoir dire qu'on les a faites. Ca marche. Au XXIe siècle, l'espace politique est l'espace médiatique.

Le succès de l'UMP révèle d'ailleurs toute la grossièreté de Brice Hortefeux, qui se retrouve 'malgré lui' élu, alors qu'il ne pensait faire que de la figuration. La démocratie apparemment est un jeu, et être élu, c'est-à-dire se voir remettre par le peuple un mandat à exécuter en son nom, est un beau désagrément, car il faudrait alors quitter la cour du président. Ce qu'ils doivent être contents, ses électeurs, qui se voient méprisés au point que c'est Sarkozy qui va décider si oui ou non l'homme qu'ils ont élu en tant que député européen va les représenter ainsi qu'ils l'ont voulu par les urnes!

Allez, passons pour cette fois parce que Sarkozy a eu un trait d'humour ce weekend, dans sa conférence de presse avec Obama. Quand on demande à ce dernier pourquoi il ne passe pas beaucoup de temps en France, Sarkozy s'énerve dans son ton habituel de vous-la-presse-vous-êtes-vraiment-trop-crétins et, le sourcil relevé d'indignation, demande au journaliste s'il croit qu'ils n'ont que ça à faire, de poser pour les photographes alors qu'il y a du travail. Sarkozy, M. Bling-Bling, l'homme de Voici et de Gala, celui qui a fait du politique un people, qui rechigne à se faire prendre en photo à côté d'Obama, qui jusque-là lui avait systématiquement refusé ses demandes d'entretiens devant les caméras? C'était sans doute la prescience du score du PS le lendemain qui le mettait d'humeur joueuse.

Mais l'important est ailleurs.

Bayrou, qui samedi avait les noms des sondeurs qui ourdissaient sa perte à coup de manipulation médiatique, a oublié de les donner hier soir. A force de trop penser à la présidentielle, on rate des marches.

Le PS s'est comme d'habitude ridiculisé à nouveau, comme à virtuellement toutes les élections depuis Jospin, mis à part une régionale par ci, ou une municipale par là, et est passé à 0,2% de devenir le deuxième parti de gauche en France. A écouter Aubry, ou Hammon, c'était prévisible, ils dressent eux-mêmes un tableau tellement noir du PS qu'ils auraient dû, par humanité, prévenir avant dimanche les français d'éviter surtout de voter pour eux. Le problème, c'est qu'ils ont les mêmes phrases depuis le 21 avril 2002, et que c'est long, tout de même. Bien sûr, Royal, qui avait senti venir le grain, s'est bien gardée de montrer sa tête dimanche soir, et prépare sans doute son retour triomphal au sein de l'appareil du PS, sans se douter un seul instant que tout le monde se contrefout éperdument du savoir si les nullos à la tête du PS s'appellent Aubry, Royal, Hollande, ou Fabius. "Il faut se reconstruire, il faut recoller à la société, il faut travailler les idées..." Depuis sept ans, ils procrastinent, parce que les gens de la génération Mitterrand qui sont maintenant en haut de la bête s'imaginent qu'elle marche encore comme à l'époque, et qu'il faut juste attendre.

Pour Cohn-Bendit, par contre, c'est une victoire, et personne ne l'attendait à 6% au-dessus du PS en région parisienne, par exemple. A s'appeler Europe-Ecologie, il a réussi à faire oublier que derrière se cachent les Verts, qui sont d'habitude connus pour se détester mutuellement et ne pas rentrer de vacances quand il y a une marée noire en France (n'est-ce pas Mme V.?). C'était surtout la seule liste à oser parler d'Europe dans une élection européenne où tous les autres se battaient pour la présidentielle.

Un perdant, par contre, c'est le rondouillet Besancenot, qui avec son NPA pour rassembler les gauches bien à gauche, se retrouve derrière le PC, et ça, comme disent les jeunes, c'est la lose.

Enfin, Gollnish, Marine et son papa vont pouvoir aller à Strasbourg rejoindre les fascistes de toute l'Europe, dans le groupe le plus classe et sympa du parlement.

Quant aux 60% d'abstentionnistes, je les remercie d'avoir donné à ma voix beaucoup plus d'importance que s'ils avaient voté.


Fouilles.

Mon sac peut parfois contenir des objets qui feraient hausser les sourcils d'un policier zélé. J'ai déjà fait des voyages transatlantiques en avion avec un couteau suisse dans mon sac à dos, juste avec les attentats du 11 septembre. J'ai aussi le souvenir ému d'un été moite passé à traverser la France pour échouer à des oraux de maths et de physique, où pour me faire un sandwich, j'avais acheté dans un supermarché un splendide et énorme couteau de cuisine. Peut-être que mes examinateurs auraient été plus agréables s'ils avaient su que j'avais une lame de 20cm dans mon sac à côté du tableau.

Dimanche, j'ai réalisé une traversée épique. Il faisait entre 32 et 3000°C, sans vent, avec un soleil lourd, et j'ai dû parcourir la distance entre le bout du quai le plus éloigné de la gare de Lyon, et la gare d'Austerlitz. La première était débordante de monde et la seconde se situait à peu près à l'infini. Lourdement chargé, après m'être frayé un chemin entre les familles, les obèses, les types louches qui parlent tout seul et les adolescents frimeurs, qui encombraient la gare de Lyon, il m'a fallu traverser le très long et exposé pont menant à Austerlitz.

Le parcours a bien sûr été interminable, et pendant que je perdais environ 60% de mon contenu en eau, je me suis encouragé intérieurement, en me disant que je n'avais pas le droit de faiblir et de m'effondrer comme une fiente en plein soleil. Des gens seraient sans doute venus. Qui est-il? Quel est le nom de ce géant sympathique mais évanoui, qui a perdu connaissance sur le bitume implacable de la capitale assommée de chaleur? Pour reconstruire mon parcours, ils auraient pu regarder le contenu de mes sacs. Quelle histoire reconstruire avec, entre autres, le marteau de maréchal-ferrant de l'arrière grand-père, un livre d'astrophysique, un dictionnaire anglais-français de 1846, une tranche de Comté, et quelques casseroles en cuivre?

Il est de ces occasions où il faut avoir le bon goût de ne pas s'évanouir, se faire renverser par un bus ou se faire contrôler intempestivement par des policiers.

Un peu de littérature que diable V.

Quoi, la remontée dans le temps de mes lectures n'est pas arrivée à un terme, sûrement mérité? Pas encore. C'est que je lis des choses bien, en ce moment, et avant de pouvoir en parler, j'ai encore un bon paquet de bouquins à passer. Allons-y, cela fera passer le temps pendant cette adorable canicule printanière.

24. 'Best of', H.P. Lovecraft.
Après K. Dick, un autre auteur marquant, mais, comment dire, là où Dickounet a juste pris du LSD, Lovecraft a un pied dans l'asile de fous. Il faut s'imaginer un type relativement médiocre et insignifiant du début du XXe dans la Nouvelle-Angleterre dont les racines puritaines n'inspire pas la fantaisie, et qui, fiévreusement, chez lui, dans un anglais châtié et vieilli, délicieusement désuet, toujours digne et travaillé, écrit des nouvelles pleines de malédictions, de démons sans âge, de Dieux maléfiques, d'artistes fous, de meurtres, de lieux étranges et maudits, habités par des créatures marginalement humaines. Ca décape, et le tout semblerait presque anachronique si ce n'était le style solennel qui peut, je l'avoue, paraître au premier regard un peu ennuyeux, mais qui participe à l'atmosphère particulière de toutes ces nouvelles.

25. Histoire du Juif Errant, Jean d'Ormesson.
Soufflé par une ancienne lecture de la Gloire de l'Empire, j'ai voulu m'attaquer à d'autres romans de ce délicieux monsieur. Un peu comme dans le Pendule de Foucault d'Umberto Eco, le lecteur est pris dans le tourbillon d'une Histoire éclatée puis reconstituée, réinterprété dans un nouveau puzzle, avec pour personnage central et innamovible le Juif Errant, cynique, enthousiaste, rancunier et en perpétuel mouvement. Lire d'Ormesson, c'est se laisser glisser doucement, c'est savourer avec lui son histoire. Un peu trop avec lui, peut-être, car là où la Gloire de l'Empire a la fausse objectivité d'un Michelet, le Juif Errant se heurte un peu à d'Ormesson, l'homme, mais heureusement moins quand dans le Rapport Gabriel, lu ultérieurement.

26. Demain les chiens, Clifford Simak.
Ne voulant jamais trop m'éloigner de la SF, je me lance à un supposé classique introuvable en langue de Shakespeare. Parfois, les éditeurs américains et anglais délaissent des auteurs, qui sont amoureusement publiés par des français, comme Brian Aldiss. C'est la seule chose notable à dire sur ce roman, qui se lit facilement, mais qui laisse facilement filtrer par sa ringardise le fait qu'il a été écrit en 1952. Ca parle de chiens, qui survivent aux hommes, sauf un type, qui apprend aux fourmis à construire des chariots. Je ne me souviens plus très bien, sauf que l'idée générale est que la technologie, c'est vilain.

27. Eugénie Grandet, Balzac.
Voulant plonger enfin dans les classiques de la littérature française, après avoir enfin découvert Zola, je me lance dans Balzac. Au risque de paraître paysan et rustre, mais mon enthousiasme s'arrête assez vite. Outre la typographie pénible, avec ses paragraphes interminables, sans aucun retour à la ligne, même pour les trois phrases de dialogue du romain, le sujet n'a rien de follichon. Là où Zola tape là où la société a mal, Balzac comme Flaubert ou ce genre de personnages reprend l'éprouvé scénario suivant:
  • Une jeune fille innocente est élevée dans l'idée de la vertu dans un milieu bourgeois mais strict
  • Débarque un jeune homme représentant le monde et la liberté, qui corrompt son coeur puis s'en va
  • La jeune fille cultive maladivement le culte du jeune homme
  • Ledit jeune homme est un ingrat qui est totalement insensible à ce dévouement
  • La jeune fille, meurtrie par ce dédain, sacrifie néanmoins son existence terne et oisive au souvenir des deux ou trois conversations qu'elle a pu entretenir un jour avec le malotru.
Alors je me ferai peut-être casser la gueule par des profs de français indignés, mais ces histoires noires sur des vies brisées où rien ne se passe, ça me barbe.

28. Nana, Zola.
Zola, à la rescousse, pour me délivrer du pesant Balzac. Alors que ce dernier était apparemment en admiration devant le premier, tout les sépare. Dans Nana, la susnommée, fille de Gervaise de l'Assomoir, est la courtisane venue de la rue qui corrompt de l'intérieur la haute bourgeoisie d'un Empire tellement rongé par ses vices qu'il se désagrège sous leur poids. Zola, comme toujours, reste en retrait, mais pousse, bouscule, malmène ses personnages. Nana, c'est l'histoire d'une femme qui chute irrémédiablement, mais qui veut à tout prix emporter tout le beau monde qui lui fait la cour avec elle. C'est l'histoire de tous les puissants, industriels, banquiers, politiques, aristocrates, qui se tiennent tellement entre eux par leur corruption qu'ils ne se rendent pas compte qu'ils sont tous en train de tomber en même temps.

1er mai à Paris.

J'aime me promener dans la rue et prendre des quidams en photo, mais les quidams n'aiment pas forcément se voir braquer mes peu discrets objectifs dans leur figure. Comme si le monde n'était pas qu'une source de divertissement destinée à occuper ma personne! Des fois, les gens ne savent pas où est leur place.

Toujours est-il que j'affectionne les grands rassemblements populaires, parce que dans la foule, on ne voit pas forcément le pleutre photographe qui vole en douce les portraits en s'imaginant qu'il capture des âmes. Le 1er mai, je me suis donc fondu dans la population.

Paris, sous le soleil, gagné aux piétons! Quel plaisir si rare, dans une ville superbe mais étouffée, broyée, noyée, salie sans cesse par le flux de bruit, de crasse et de gaz polluants des voitures. La rue s'ouvre au flâneur, respire, s'étire.

Je fais un détour par le cimetière Montparnasse, espérant retrouver des bouts d'histoire sous des pierres abandonnées aux mousses, comme au Père-Lachaise. Cet espoir est déçu, mais je finis par trouver des CRS qui font la queue devant les WC du cimetière, à deux pas de la tombe de Poincaré.

Remontant la file des camionnettes où ces messieurs des services d'ordre se partagent des galettes sur des petites tables, je me dirige vers Place Denfert-Rocherau, guidé par les sifflets.

J'arrive enfin, sous une immense bannière représentant Marx, Engels, Lénine et Staline, flottant au vent à travers les fumées du marchand de saucisses en dessous. Le républicain en moi est pris de vertiges.

A côté, il y a des Kurdes, des Palestiniens, et les omniprésents Tigres Tamouls. Je me fraie un chemin dans la foule et entre les véhicules pour ne pas sentir jusqu'à ma mort la saucisse grillée.

Je remonte la rue, et tous les manifestants, regroupés en poches plus ou moins bruyantes, attendent le départ. Il y a des chants, des cris, des tracts distribués, des slogans déclamés au micro, et des saucisses et sandwiches qui changent de mains. C'est comme une grande foire où personne n'aurait rien à vendre, et où chacun retrouve les siens pour défiler.

Je remonte les électriciens, la CGT, les travailleurs sans papier, la CFDT, FO, et tous les autres, rangés par paquets dans l'attente de l'ébranlement. Et puis, dans un coin de rue, j'aperçois des gens différents. Ils n'ont pas de grosse moustache grise, ils ont moins de cinquante ans, ils n'ont pas de béret, il y a peu de femmes parmi eux. Ils sont jeunes, mâles, mal rasés, le teint pâle de ceux qui ne voient jamais le soleil; certains ont une queue de cheval. Ils sont en jean et en tshirt noir où figurent d'obscures références informatiques. Je m'arrête. Des geeks, dans la rue! Mon peuple, ici!

L'APRIL, la Quadrature du Net, Ubuntu-fr, et les comparses habituels sont là. Quelques bannières anti-Hadopi flottent çà et là. La loi est une telle aberration qu'elle fait sortir ceux qui ne sortent jamais de chez eux.

Au milieu, tenant la banderole, je reconnais les députés Bloche et Brard. Ce sont les fers-de-lance de la contestation de cette loi abracadabrantesque et obsolète avant d'être votée; qui regarde les débats (qui n'ont de débats que le nom, n'étant qu'une suite de monologues d'opposition, y compris de quelques braves à l'UMP, se heurtant au silence et à l'incompétence de la ministre Albanel et du rapporteur Riester) savoure leurs interventions multiples.


Brard (en jaune, hilare), c'est le vieux professeur, qui parle toujours avec lyrisme, culture, qui s'emporte dans d'élégantes critiques pleines de dérision et d'une pointe de délicieuse mauvaise foi. "Madame le ministre, je vois que vous opinez du chef dans le mauvais sens..."


Quant à Bloche (ci-dessus), c'est le portrait même du député. Physiquement, il a une tête de député. Quelqu'un, à quelques pas, m'a demandé qui était ce député, car sans le connaître il avait naturellement senti qu'il ne pouvait être qu'un député. Si Bloche était né dans des temps où le Parlement n'existait pas, il aurait quand même été député, tout seul. Carré, droit, l'air grave, toujours très précis et rigoureux dans le discours, ne tombant jamais dans la facilité des attaques ad hominem, c'est l'image du député que celui qui n'a jamais regardé des débats de la véritable assemblée se fait de la représentation nationale. Pour un contre-exemple, il faut regarder par exemple les interventions de l'assez exécrable Gosselin.

Enfin le cortège s'avance, et derrière un mur de journalistes et photographes j'aperçois de loin le casque capillaire de Bernard Thibault, sorte de Dark Vador décoloré. Chaque paquet de manifestants s'avance un à un, et les anti-Hadopi arrivent finalement à s'insérer dans la masse.

S'ensuit une longue promenade à travers un Paris sans voitures mais avec un gros tas de piétons. De près ou de loin, je gravite autour de mes frères geeks, volant l'image des passants alentour. A chaque coin de rue, des banderoles anarchistes, des slogans scandés sans réfléchir, des affiches d'associations ou de partis obscurs. "Vive le canibalisme social, dans le patron, tout est bon!" crie un distributeur de tracts, qui répand ses relents léninistes dans la foule. Le PS attend sagement dans une rue perpendiculaire de pouvoir s'avancer à son tour. Je vois Martine, Cambadélis et Jean Polochon, l'émotion m'étreint. Plus loin, c'est la moustache de Mamère qui répond à des journalistes. Alain Lipietz surgit de nulle part et rejoint le cortège.

Sur le passage des anti-Hadopi, des sourcils se lèvent. Il faut dire que le français moyen, dans le contexte politique, économique, et médiatique actuel, n'est pas au courant que le gouvernement veut contrôler Internet, contraindre à l'installation de logiciels espions, confier la surveillance des communications à des intérêts privés avec des pouvoirs normalement réservés aux brigades anti-terroristes, et bouter hors du réseau les gens qui auront déplu à Pascal Nègre. Les quidams hochent la tête, mais ne comprennent pas tous l'enjeu de société qui se joue.

Finalement, c'est sans député mais deux fois plus nombreux que les anti-Hadopi arrivent place de la Bastille. De jeunes gens sont montés au pied de la colonne, et un drapeau tamoul flotte au milieu d'eux, à côté d'un mime marceau portant un drapeau gay. Une fois arrivée, la foule se disperse, en silence, comme à la fin d'une ballade.

Je suis rentré avec mon reflex alourdi d'âmes de toutes sortes.


Hadopi, la bonne rigolade

Ca y est, la loi Hadopi a été rejetée, grâce aux socialistes qui savent cacher une poignée de députés. Bien sûr, c'est un scandale pour la démocratie qu'une loi aussi aberrante puisse passer ou ne pas passer devant la seule présence d'une quarantaine de députés, sur ~580. Quand à l'UMP qui dénonce une manoeuvre, c'est burlesque, quand on pense aux députés UMP qui pendant les débats ne venaient que pour les votes des amendements, et repartaient aussitôt que les débats reprennaient. Alors évidemment, on les voit partout ces derniers temps, Copé qui n'était pas là pour voter, Karoutchi qui n'était pas là pour voter, ou l'insupportable Lefevbre qui avait préféré se casser pour aller manger plutôt que voter.
Du coup, c'est reparti pour un tour. C'est pour le 28 avril, dit le gouvernement. Albanel a même ce soir dit que si sa loi n'était pas représentée le 28 avril, elle partirait. Ca tombe bien, d'après le député UMP Tardy, qui était le seul à droite à savoir de quoi il parlait pendant les débats, la date du 28 avril n'est pas si évidente que cela.
Ferait-on ainsi d'une pierre deux coups? Se débarrasserait-on d'une loi anachronique qui ne sert que quelques industriels en nous privant de libertés individuelles, ET d'une ministre de la Culture d'une nullité si avérée?
En attendant, je suis fort amusé que Google me référence en 1ère position pour la recherche "mensonges Hadopi". C'est une petite fierté, comme d'être premier pour "Florent Pagny Assassin". Ca fait chaud au coeur.

Un peu de littérature que diable IV

On continue, c'est que de la SF pour le coup.

16. Broken Angels, Richard Morgan
Après une très bonne impression de son premier roman avec Takeshi Kovacs, je me suis lancé dans le second avec enthousiasme. Bon, il est en dessous d'Altered Carbon, et là où le premier était un savoureux mélange de roman noir et d'anticipation, celui-là fait plus dans la SF militaire. Il y a toujours de l'action, des gens qui se prennent des coups, et même des restes archéologiques laissés par des Martiens il y a quelques milliers d'années. Bref, c'est toujours de la meilleure SF que tout ce qu'a fait Hollywood depuis des temps immémoriaux, mais c'est moins frappant qu'Altered Carbon.


17. Pastwatch: Redemption, Orson Scott Card
J'ai toujours aimé les histoires de voyage dans le temps, sans doute depuis une délicieuse nouvelle de William Tenn où un clodo, payé par un scientifique qui vient d'inventer une machine à voyager dans le temps, remonte au cambrien, et finit par détruire le monde par bêtise et désintérêt. Orson Card, c'est surtout l'auteur d'Ender's Game, un des classiques de la science-fiction qui se laisse facilement dévorer en un après-midi de dimanche pluvieux. Dans ce roman, des scientifiques ont une machine qui permet de voir dans le passé: ils deviennent des historiens qui sont alors témoins des faits marquants comme des moindres aspects de la vie des gens d'autrefois. Certains se penchent sur le cas de Christophe Colomb, qu'ils tiennent pour un personnage clé dans la destruction des civilisations amérindiennes. Mais comme Nietzschounet et son abysse, ces historiens s'aperçoivent que s'ils peuvent voir le passé, ils peuvent aussi être vus... Bon, au final c'est un peu léger, c'est plein de bons sentiments consensuels, mais c'est une histoire de voyage dans le temps donc c'est déjà ça.

18. To your scattered bodies go, Philip José Farmer
Voilà un autre classique de la SF que je n'avais jamais lu. Un jour, tous les gens ayant jamais existé sur Terre se réveillent. Ils sont nus, seuls, sans explication, sur les rives d'une interminable rivière. Ils sont mélangés par nation, époque, langue. Pour essayer de découvrir ce qu'il se passe, certains construisent un radeau pour descendre la rivière, rencontrant des gens de tous temps et de tous lieux. Un bon livre, mais avec une fin trop ouverte, pour permettre à Farmer d'engranger les suites.

19. Count Zero, William Gibson
William Gibson est M.CyberPunk. Ses héros sont des hackers, qui évoluent dans un monde brutal qui appartient à qui sait trouver, manipuler et utiliser l'information au bon moment. Le nom du sous-genre SF reprend très bien l'esprit de ces univers. C'est un genre un peu délaissé dans sa forme première (datant dans années 80) parce qu'avec l'avènement d'internet, et par exemple la mafia russe qui contrôle notoirement d'immense réseaux de botnets pour les louer aux malfrats les plus offrants, le cyberpunk paraît plus être prophétique que de l'anticipation. Il a été récupéré par Hollywood, qui a retiré le côté Punk et réduit le Cyber au minimum. Matrix, par exemple, est une faible et pâle copie de Neuromancer de Gibson.
Toujours est-il que Count Zero est dans cette tradition, avec pour anti-héros un hacker plutôt mauvais qui se retrouve embarqué dans une histoire sérieuse et sérieusement alambiquée. C'est aussi une des marques de Gibson, apparemment: quand on finit son bouquin, on sait qu'il s'est passé des tas de choses, mais on n'est jamais sûr de quoi exactement.

20. The Man in the High Castle,
21. The Three Stigmata of Palmer Eldritch,
22. Do Androids Dream of Electric Sheep?,
23. Ubik, Philip K. Dick
Hollywood, quand il ne reprend pas Gibson, fait du K. Dick. Ces dernières années, il est difficile de trouver un film de SF majeur n'étant pas tiré d'un de ses livres. Etant étonné de ce constat vu toute la bonne SF contemporaine décrite dans ma formidable liste, j'ai voulu m'attaquer à cet homme dans un joli volume reprenant quatre de ses romans.
Conclusion: Philip K. Dick était fou. Il plaît maintenant plus qu'il n'a plu à son époque parce que sa SF est très noire, schizophrène, paranoïaque. A part le premier roman qui est en réalité une uchronie où les Alliés ont perdu la Seconde Guerre mondiale et où la Californie est administrée par les Japonais, ces oeuvres parlent d'un futur lourd et noir où l'homme cherche toujours à fuir la réalité au point de ne plus savoir distinguer le virtuel du réel. Et le lecteur est embarqué par la même occasion: ce qui semble vrai au début du roman bascule soudain dans l'irréel, et l'irréel apparaît comme avoir toujours été le vrai. Et puis ça bascule encore, une, deux, trois fois. Dans The Three Stigmata of Palmer Eldritch, c'est une drogue qui permet de s'échapper, dans Do Androids Dream of Electric Sheep? , le protagoniste qui poursuit des androïdes ne sait plus trop s'il est vraiment humain, et dans Ubik... dans Ubik il ne vaut mieux pas essayer de chercher le vrai du faux, ou alors on atteint vite des dizaines de lectures différentes de ce qu'il se passe vraiment.
Ce qu'Hollywood cache bien soigneusement en reprenant des histoires de Philip K. Dick, c'est son pessimisme total: tous ces romans sont désespérés. Les personnages essaient de comprendre ce qu'il se passe, mais sont toujours dépassés, sont toujours le jouet de puissances plus fortes, et n'ont aucun espoir de reprendre la main sur les évènements. Les mondes de K. Dick sont des mondes qui écrasent leurs habitants sans leur laisser leur chance. Des mondes où les individus sont manipulés, méprisés, et insignifiants. Et là où Hollywood veut garder au final l'idéal américain de l'homme qui peut se sauver par son labeur, mythe du rêve américain prolongeant le puritanisme des premiers colons, Philip K. Dick reste implacable. Au bout, il n'y a que l'abîme.

Hadopi, les débats

L'assemblée nationale diffuse en direct, en streaming, les débats sur la loi dite Hadopi.

C'est le spectacle le plus désolant que j'aie vu depuis longtemps. Il semble que les rares députés de la droite (hormis le courageux Tardy), ainsi que le rapporter Riester et la ministre Albanel, vivent dans une réalité alternative, où Internet est contrôlable à volonté, où les mesures techniques sont toutes réalisables, et où le bon sens est une théorie qui fait pouffer, et où la culture, ce n'est pas les artistes, mais les épiciers qui vendent leurs oeuvres.

Pépite vue toute à l'heure, pendant la discussion d'un amendement (évidemment rejeté) de la gauche qui visait à forcer l'Hadopi, avant de banir d'Internet un quidam, de vérifier auprès des auteurs de l'oeuvre piratée qu'ils ne l'ont pas distribuée libre de droit. Albanel: "Mais vous n'y pensez pas? Vous réalisez à quel point ça serait compliqué si pour chaque décision il fallait vérifier que les ayants-droits n'ont pas cédé leurs droits?"

Donc on peut se faire jeter d'Internet, parce que vraiment c'est trop compliqué de regarder s'il y a réellement matière à se faire jeter d'Internet. Le téléchargement est illégal du moment où il ne vient pas de fnac.com. Tant pis pour les artistes qui proposent leur musique gratuitement sur leur site...

Déjà, hier soir, c'était rigolo. L'assemblée et le gouvernement ont rejeté des amendements visant à assurer la représentation des internautes dans la comission Hadopi, et même rejeté qu'un membre de la CNIL soit nommé. Ils ont ensuite ignoré toutes les remarques de la gauche et de Tardy sur les impossibilités techniques des écoutes électroniques prévues par la loi et sur la nécessité d'avoir un juge dans la boucle.

Mais bon, la loi va passer. Nous allons pouvoir bientôt nous faire jeter d'Internet, sans décision de la justice, et sans même savoir exactement ce qui nous est reproché. Le délit? Défaut de sécurisation de ligne Internet. Quand on pense que même les ministères abandonnent le WiFi car leurs services techniques n'arrivent pas à le sécuriser totalement, bonne chance M. et Mme Toutlemonde!

Ce qui ressort de plus frappant dans ces débats qui n'en sont pas --- la gauche essaie d'expliquer l'impossibilité et les dangers de la proposition de loi, et la droite ne répond pas --- c'est d'après les réflexions de la ministre son inconcevable incompétence technique. Sa solution contre le cryptage des réseaux pirates? Un "contre-logiciel"! C'est si simple, il suffisait d'y penser, contrairement à ces blaireaux de la lutte anti-terroriste qui mettent des semaines à casser un cryptage, s'ils y arrivent!

En tous cas, merci messieurs Bloche et Paul pour vous être penchés sur la question et être au moins au courant de ce qui est possible ou non techniquement.

Allez, une dernière blague: les députés viennent d'adopter un amendement pour instaurer une discrimination positive de certains sites dits de téléchargement légal dans les moteurs de recherche! Allô Google, en Californie? Montez la FNAC dans vos recherches, brisez la neutralité d'Internet parce que le gouvernement français sait mieux que le peuple ce qu'il doit savoir et quel site il doit visiter! Allez Microsoft, Yahoo, Excite, Baidu, même chose! Ils sont désagréables, tous ces gens, d'être à l'étranger.

C'est incroyable de voir quels principes sont cassés pour le seul compte d'une industrie des médias qui refuse de se moderniser, qu'est-ce qu'on va prendre quand il s'agira de voter sur une loi sur la sécurité ou le terrorisme!

Les débats reprennent à 21h30. Je ne sais pas si j'aurai le courage de regarder autant de mauvaise foi, d'ignorance inexcusable, et de volonté incompréhensible de contourner l'état de droit.

Bougonneries multiples.

Le monde de la musique va mal.

Tout d'abord, à partir de la semaine prochaine, les radios de Last.fm, site tant chéri, vont devenir payantes pour tout le monde, sauf les USA, l'Angleterre et l'Allemagne. C'était bien tant que ça durait, mais le last.fm que je chérissais, celui centré sur des gens qui partagent leurs goûts musicaux, est mort. L'entreprise last.fm est en marche, la communauté n'est plus centrale mais un outil pour se faire des gros sous. Tout le monde devra payer pour écouter, sauf les trois pays chouchoutés, la somme de 3€ par mois. Cela peut paraître encore peu pour nous bons français, mais nos amis mélomanes de pays moins riches l'ont mauvaises. Un commentateur de la décision sur le site lui-même disait qu'habitant en Roumanie, son loyer mensuel était de 30€, ce qui donne une idée de ce que représente 3€ pour lui. Qu'importe! le précieux marché anglo-saxon est préservé. Last.fm, je suis déçu.

Et ensuite, je tombe sur ça. C'est le dernier clip de Chris Cornell. Oui, cette bouse monstrueuse, ce RnB de supermarché saupoudré de fiente commerciale, est dans le dernier album de celui qui a été le leader et chanteur de SoundGarden et plus récemment d'AudioSlave. Les bras m'en tombent. Cornell, une des voix les plus intéressantes et originales au monde, qui tombe dans ce gouffre de médiocrité? C'est quoi la suite? Thom Yorke en duo avec Garou? Mick Jagger qui reprend le Petit Bonhomme en Mousse? Le coeur serré, je ne peux que refaire tourner dans Amarok SuperUnknown, la pépite de SoundGarden, dont le CD, du temps où ces choses existaient encore, s'est usé si longtemps dans ma chaîne HiFi.

Et puis, même si ça n'est pas de la musique, le Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU a voté une résolution qui condamne "la critique de la religion" comme violant les Droits de l'Homme. Je ne sais pas pourquoi, apparemment tout le monde s'en fout, j'ai dû creuser dans les méandres de l'Internet pour trouver cette information aberrante.

Allez, promis, je ne vais même pas mentionner comment le pape en voyage en Afrique annonce que le seul moyen efficace de lutte contre l'épidémie de sida, pour une raison magique non communiquée, "aggrave le problème", sans doute parce qu'il pense encore que c'est la maladie du péché et qu'il n'a pas compris que c'est juste la maladie de la pauvreté et du manque d'éducation.

Et comme décidément le monde est mal fait, le site officiel de Jean Sarkozy, jeansarkozy.org, ne va plus sur sa délicieuse page personnelle mais sur celle des élus des Hauts-de-Seine de l'UMP.

Et puis l'excellente série Battlestar Gallactica est finie, ça y est, il n'y a plus de série de SF en existence qui n'est pas tellement ringarde qu'elle fait regretter la Chance aux Chansons.

En parlant de ringards, et pour finir, les choses vont être drôles pour le vote de la loi dite "Création et Internet" cette semaine: le seul autre pays au monde qui avait la bêtise de préparer une loi similaire l'a abandonnée, et le parlement européen a réaffirmé la semaine dernière que le droit à l'accès à internet était indissociable du droit à l'éducation et que par conséquent personne, ni entreprise ni état, n'avait le droit de couper l'accès internet à quiconque. Oups! La loi qui sera sans aucun doute votée le 31 mars sera donc dès sa naissance en contradiction avec les règles européennes, donc inapplicable. C'est drôle, la politique.

Non, allez, encore une: la police britannique a lancé une formidable campagne de sensibilisation, pour inciter la population à la délation. Il faut voir leurs posters, ils valent le coup d'oeil. L'un d'eux dit, à côté d'une photo d'un centre commercial: "une bombe n'explosera pas ici, parce que quelques semaines plus tôt un client a dénoncé quelqu'un qui étudiait les caméras de surveillance". Je prends note, si un jour je vais outre-Manche, de ne jamais regarder les omniprésentes caméras dans les yeux, sous peine de me prendre une balle dans la tête. C'est tellement dommage. Dans le métro, quand je vois une caméra et que je suis raisonnablement seul, je ne manque jamais de faire une grimace pour égayer la soirée d'un surveillant blasé devant ses petits écrans noir et blanc. Je suis joueur.

Un peu de littérature que diable III

Allez, on continue.


11. Fahrenheit 451
, Ray Bradbury
J'en ai toujours voulu à Ray Bradbury, sans savoir pourquoi. Peut-être parce que dans ma jeunesse les profs de français me disaient de ne pas lire de la science-fiction, ou à l'extrême rigueur Orwell ou Bradbury. Ayant surmonté mon aversion pour le premier, je me suis tourné vers le second. Bien sûr, tout le monde connaît ou doit connaître cette histoire du pompier dont le métier est de brûler les livres. Je ne vais pas en rajouter plus, si ce n'est que malheureusement Fahrenheit 451 n'est pas aussi incisif que 1984: ce livre reste plus une fable, un pamphlet, quand 1984 est une analyse crue et prophétique de la société moderne, l'équivalent littéraire du coup de boule dans les parties. Mais décidément, les dystopies, c'est mon dada.



12. The Ophiuchi hotline
, John Varley.
Voilà un court roman de science-fiction qui a le mérite d'être court. Dans le futur, un flux d'informations scientifique venant d'on ne sait où nous tombe dessus, permettant à l'humanité de progresser très vite. Il se passe des choses, et des gens veulent savoir exactement d'où vient tout ça. Pas terrible, à part pour la description des formes de vie dans l'atmosphère de Jupiter, qui est plutôt chouette.





13. Slaughter-House Five
, Kurt Vonnegut.
Voilà un classique de la littérature moderne anglo-saxone qui fait appel à une variante du voyage dans le temps, en oscillant entre plusieurs époques, dont la seconde guerre mondiale, et plus précisément le bombardement de Dresde. Le livre reste plaisant, parfois léger, parfois grave, changeant toujours d'époque mais gardant une certaine acidité un peu désabusée façon Catch-22.





14. L'assomoir, Emile Zola.
Tournant le dos à une vie de refus de lire Zola, je cède à la bien-aimée et me plonge dans l'Assommoir. C'est la claque. Dès les premiers paragraphes, tout le décor de la fin du XIXe se redresse, et étale ses injustices, ses fautes, ses médiocrités. Tous les personnages se traînent dans une pauvreté noire, autant à cause de la société et des difficultés économiques que par leur propre complaisance à rester si près de la fange qu'ils finissent par y retomber inévitablement.
L'écriture est sans faille. Faussement neutre, sans un mot de trop, débordant de mouvement, révélant juste assez pour laisser deviner le reste. Zola est implacable, sans pitié pour ses personnages cassés par nature et qui se font broyer par le siècle. L'hostilité de ses contemporains est compréhensible: le malaise, le dégoût sont toujours aussi palpables malgré une sécurité de près de 150 ans de distance. Où est le Zola d'aujourd'hui? Qui pour dénoncer de manière si précise, impitoyable, et crue les injustices du monde moderne? Voudrions-nous l'écouter?


15. Collected Stories Vol1
, Richard Matheson.
Matheson est des auteurs-clé du fantastique et de la science-fiction du milieu du siècle dernier. Pour mémoire, il a écrit Je suis une légende, qu'il faut lire et non regarder en flim. Il a aussi écrit la nouvelle (non lue par mes soins) dont Spielberg a tiré son atemporel Duel.
Ce livre est un recueuil de nouvelles diverses, et force est de constater que décidément, la science-fiction des années 50 vieillit mal. Les seules choses intéressantes sont plutôt du côté du fantastique, comme l'histoire où un auteur aigri de ne pouvoir rien écrire communique sa rage à sa maison qui en retour le détruit implacablement, à chaque instant.
Mais de façon générale, rien de bien folichon.